Mise à jour du 2 février 2004

EUROPE

 

L'Europe ou l'antijudaïsme au jour le jour

Intervention de François ZIMERAY (député européen) lors de la manif du 29/05/2002

Une résolution injuste

 Palestine=Tchétchenie?

 

 

EUROPE

L'Europe ou l'antijudaïsme au jour le jour 02 Février 2004 Aruts sheva

La scène se déroule mercredi dernier à Hasselt en Belgique. L'équipe nationale de football en salle, affronte Israël en tournoi qualificatif du championnat d'Europe. Le ton est donné d'emblée par des supporters de l'équipe belge qui, brandissant les drapeaux verts du Hezbollah et du Hamas, scandent durant toute la soirée en français : "Juifs au gaz ! Mort aux Juifs ! Egorgeons les Juifs !" et en néerlandais : "Hamas, Hamas, tous les Juifs au gaz". Le Forum des organisations juives, la ville de Hasselt et un ministre déposent une plainte. Les caméras de la télévision locale, qui ont enregistré l'incident, permettront peut-être d'aider à l'identification par la police des nouveaux hooligans du football en salle belge.

 

Villeurbanne, la famille Halimi coule des jours heureux, jusqu'à ce que la violence palestinienne déferle contre Israël. Il n'y a, à priori, pas de rapport avec les membres de cette paisible famille juive française. Sauf que des voisins, d'origine musulmane, en ont décidé tout autrement. Deux ans durant, ils feront subir un véritable calvaire aux Halimi et à leurs 2 jeunes enfants. Croix gammées sur les murs, insultes quotidiennes, immondices déposées devant leur porte, le garçonnet de 7 ans est mis à l'index à l'école, à l'initiative de son petit voisin du même âge, déjà sensibilisé par ses parents à l'antijudaïsme. La police peine à réunir les preuves contre les voisins malintentionnés, jusqu'au jour –deux ans plus tard- où Rabah Zehani, 24 ans, est pris en flagrant délit de coups et blessures contre son voisin juif, qu'il avait agressé à coup de pierres. Il a écopé mardi dernier de six mois de prison ferme pour violences, mais aussi injures et provocation à la haine raciale. La famille Halimi a été provisoirement relogée.

 

Retour dans une salle…de spectacle cette fois. Samedi soir dernier, à Macon, lors d'une soirée "pièce jaune" destinée à aider les hôpitaux "à rendre plus agréable la vie quotidienne des enfants hospitalisés". La chanteuse Shirel prend le micro. Au premier rang dans le public, Bernadette Chirac et le judoka David Douillet. Shirel commence son tour de chant, mais des cris surgissent depuis la salle : "sale juive" et "au four, au four". L'artiste garde son sang froid et propose spontanément au public d'entonner "une chanson d'amour Yéroushalayim Shel Zaav".

 

Au même moment, le Premier ministre français affirmait devant les centaines d'invités qui se pressaient au dîner annuel du CRIF : "Vous pouvez avoir confiance en la France parce que vous êtes la France, parce que chacun d'entre vous détient une partie de ce bien commun qu'est notre pays (…) Je dis aux Juifs de France : n'ayez pas peur".

 

DS

 

Interventions de François ZIMERAY (député européen) lors de la manifestation à Bruxelles le 29 mai 2002.

Il y a des hommes portés par des rêves qui les rassemblent, mais aujourd'hui ce qui nous réunit c'est un même cauchemar qui dure depuis deux ans.

Un jour d'été comme un autre à Jérusalem : c'est les vacances, la famille.

L'homme est entré dans le restaurant avec un sac lourd. Plus de dix kilos d'explosifs, des clous des vis et des boulons. Il s'est approché, a regardé autour de lui les visages des enfants, des bébés aussi. Quand il était bien au milieu, il a déclenché sa bombe.

 

Haya, huit ans : "La dernière fois que j'ai vu mon frère de quatre ans, il était dans l'ambulance. On avait bien faim, alors maman a décidé de nous amener au restaurant. Elle est morte avec papa et aussi mon grand frère, et ma toute petite sœur. Elle était toujours heureuse. Je me souviens bien d'elle, elle riait tout le temps. Ce jour là, elle était très gaie. On a attendu papa, il revenait de la banque quant tout a explosé. J'adorais ce restaurant, il y avait une si bonne pizza".

 

En deux ans, depuis la deuxième Intifada, plus de 400 civils, des enfants et des bébés ont été massacrés parce qu'ils étaient juifs et vivaient en Israël. Plus de 1500 sont blessés à vie.

 

Depuis deux ans nous sommes les témoins d’un déchaînement de haine contre le cœur d’Israël, sa jeunesse son désir de vivre. Il plonge dans le malheur et la crainte ce pays auquel nous attachent tant de valeurs et aggrave les souffrances que les Palestiniens endurent du fait des conséquences de ces attentats comme de la corruption de leurs dirigeants et de leur absence totale de souci du bien public.

 

La haine se déchaîne par le feu mais aussi par les mots, et la responsabilité de l'Europe est immense pour avoir durant des années, et alors même que les accords d'Oslo s'appliquaient, fermé les yeux sur le système éducatif palestinien déversant une pédagogie de la haine raciale, et incitant au Jihad. Car, tous les jeunes qui se transforment en bombes humaines ont reçu cet enseignement, malheureusement financé par le contribuable européen.

Cet aveuglement est non seulement un crime contre les gens, un crime contre la paix, mais c'est aussi un crime contre nos propres valeurs, les valeurs européennes.

Car enfin, notre histoire devrait nous dicter de nous comporter autrement. Mais, nous voyons bien que de Conseil en Sommet, de Sommet en session, l'Europe ne manque jamais une occasion de caricaturer l'État d'Israël de le juger, de le condamner et même de le sanctionner, alors qu'il aura fallu deux ans pour qu'elle considère les attentats antisémites qui frappent en Europe synagogues comme les écoles juives, alors qu'elle avait omis de s'indigner du  lynchage barbare de deux israéliens, et qu'elle continue à se taire devant les exécutions sommaires des palestiniens honteusement qualifiés de collaborateurs.

Depuis que Yasser Arafat a déclenché la seconde Intifada, les civils israéliens vivent chaque jour dans la peur du massacre et l'Europe se contente de déplorer verbalement les attentats sans agir de tout son poids politique et économique pour que soient arrêtés et punis leurs auteurs et leurs instigateurs. Au contraire, c'est Israël qu'il faut sanctionner, c'est les terroristes qu'il faut inviter sur notre sol !

Et quant à ceux qui ont voté cette résolution injuste demandant des sanctions économiques contre Israël, ce sont souvent les mêmes qui vous expliquent qu'il faut lever l'embargo sur l'Irak parce qu'on ne doit pas imputer à un peuple les actes de ses dirigeants !

Nous sommes venus ici affirmer avec force que rien, aucune cause, aucune raison ne peut justifier qu'il soit délibérément porté atteinte à des civils, qu'il est inadmissible de justifier le terrorisme par le désespoir, qu'il n'y a rien de grand, rien de beau, rien de noble dans cette forme de terrorisme que l'on appelle injustement martyre, que c'est la façon la plus lâche et la plus monstrueuse de défendre une cause.

Chers amis,

Israël a le droit de vivre ! Et nous n'assisterons pas passif au spectacle de la destruction de sa légitimité. Il faudra quand même nous expliquer pourquoi la défense d’Israël suscite l'indignation de ceux que toutes les violations des droits fondamentaux commises dans les dictatures arabes n'ont jamais ému.

Il faudra aussi nous expliquer pourquoi les mots qui qualifient ce conflit sont systématiquement déviés, pourquoi les images ne sont jamais mises en perspective, pourquoi désormais en Europe la compassion et la bonne conscience tiennent lieu de ligne politique.

Il faudra aussi s'interroger sur les conséquences désastreuses des positions systématiquement critiques adoptées ici même depuis des années et dont le seul effet a été d'aggraver la solitude d'Israël, de radicaliser ses positions alors même que le soutien inconditionnel – et irresponsable - de l'Europe à l’Autorité Palestinienne a infantilisé ses dirigeants, les a déterminé à refuser les offres de paix, et à surenchérir par la violence.

Pourtant, je persiste à penser que l'Europe pourrait être utile et apporter une contribution décisive à la paix ; il faudrait pour cela qu'elle cesse d’utiliser le Moyen-Orient pour solder les comptes de sa propre histoire, qu'elle cesse de se faire le procureur d'Israël et devienne un guide pour toutes les parties, en aidant à un vrai développement des territoires palestiniens dont les occupants méritent mieux que le sort que leur inflige leur dictateur narcissique.

Il y a quelques semaines - comme malheureusement chaque jour - les soldats israéliens ont arrêté un kamikaze. Mais celui-là était différent des autres. C'était un enfant et il avait été endoctriné. Il était en larmes. Il suppliait les soldats de lui retirer sa ceinture d'explosifs.

Il voulait vivre, et vivre en paix.

C'est aussi pour lui que nous manifestons.

Une résoluion injuste, par François Zimeray (Député Européen et Membre de la Commission des Affaires Etrangères et de la Défense) 10/04/2002
Voir le projet de résolution de l'Union Européenne à propos du conflit israélo-palestinien : http://www.reinfo-israel.com/docume...s=&threadid=694

Chers collègues,

Comme la plupart d'entre nous, je ressens avec douleur les événements qui emportent nos espoirs de paix au Proche-Orient. Tous les événements. D’abord les attentats qui ne cessent de baigner de sang le cœur d'Israël et de plonger dans le malheur et la crainte ce pays auquel nous attachent tant de valeurs. Ensuite, les souffrances du peuple palestinien, endurées tant du fait de la répression consécutive aux attentats que du fanatisme et encore de la corruption de ses dirigeants.

Comme vous, je me dis qu’il faut agir, «faire quelque chose» parce que je crois que l'histoire de l'Europe nous dicte des devoirs particuliers mais aussi parce qu'elle peut servir utilement d'exemple pour les Palestiniens comme pour les Israéliens.
Comme vous, j'ai lu le projet de résolution qui sera soumis au vote du Parlement européen au nom de notre groupe. Que dit-il ? Ce projet vise notamment à suspendre l'accord d'association Europe-Israël, exceptionnelle sanction qui n'avait jusque là été prise que pour le Soudan, le Nigeria, la Serbie, et le Togo. J'ai à cœur de vous dire, quoi qu'il m'en coûte, que cette initiative me paraît être une erreur politique, mais plus encore qu'elle constitue une faute morale dont les auteurs n'ont manifestement pas pris toute la mesure.

Nous y proclamons notre aversion pour le terrorisme mais nous condamnons avec force une opération dont le seul but est de poursuivre les terroristes. Est-il normal que des factures relatives aux opérations suicide annotées de Yasser Arafat aient été découvertes dans son quartier général, comme des centaines de kilos d’explosifs ? Est-il admissible que les assassins du ministre israélien du tourisme y aient trouvé asile ? Ces nouveaux éléments, apparus lors des perquisitions des 1 et 2 avril dernier à Ramallah n’éclairent-ils pas d’un autre jour l’intervention israélienne ? En tous cas, ils auraient justifié une évolution de notre position vis-à-vis de la centrale Palestinienne.

L’erreur politique c'est d'abord de vouloir sauver, une fois de plus, le soldat Arafat qui aura toute sa vie fait le choix du pire et trahi le camp de la paix. En 1996, il fit échouer Pères. En 2000, il fit chuter Barak et provoqua l'élection de Sharon. Est-ce être partial que de constater qu'il refusa de saisir la paix qui était là, à Camp David ? Est-il excessif de considérer que, durant les douze années de calme qui ont suivi Oslo, il se révéla incapable d'administrer les territoires dont il avait la charge, dans le sens du développement et le bien public ? A cet égard, les informations qui circulent sur la corruption au cœur de l'autorité palestinienne ne sont pas de simples rumeurs, elles ont été relevées par la Cour des Comptes de l'Union Européenne, et c’est un fait politique dont nous n'avons jamais voulu tirer les conséquences.
Erreur politique encore parce que cette déclaration – comme toutes celles que nous avions précédemment adoptées - repose sur le postulat qu'il n'y a pas d'autre choix que celui d'Arafat, et que toute relève plongerait nécessairement la région dans le chaos ; il est vrai qu’Arafat dirige seul et n’a jamais voulu préparer sa succession. Mais c'est mal connaître la société palestinienne - et c'est lui faire injure - que de considérer qu'il n'y a pas en elle des responsables publics intègres, soucieux des intérêts de leur peuple, réellement désireux et capables de construire une paix avec ses voisins. On le sait, la société civile comme politique palestinienne ne manque ni de talents ni de bonnes volontés. Comme vous, je mesure bien pourtant la popularité que confèrent au raïs dans le monde arabe ses postures pseudo-héroïques, mais le narcissisme ne tient pas lieu de ligne politique et nous ne saurions admettre que Yasser Arafat constitue l’indépassable horizon politique des Palestiniens.

Erreur politique toujours car notre déclaration sera interprétée comme un nouveau témoignage de complaisance envers un terrorisme qui, demain, frappera bien au-delà du Moyen-Orient. Ainsi durant plusieurs années, alors que les accords d'Oslo s'appliquaient, nous avons fermé les yeux sur un système éducatif dispensant une pédagogie de la haine raciale, du Djihad et du martyre. Tous les jeunes qui se transforment en bombes humaines ont reçu cet enseignement, malheureusement financé par le contribuable européen.

Une erreur politique enfin parce que nous n’avons jamais su tenir un langage qui suscite, par delà les critiques parfois légitimes, la confiance des israéliens, avec, pour conséquence, un discrédit de l’Europe, et pour tout dire un recul de son influence qui n’a d’égal que la croissance de son engagement financier.

Erreur politique, mais surtout faute morale. Parce que nous n’enracinons pas nos paroles dans la mémoire des faits, parce que nous nous servons de ce conflit pour régler des comptes avec notre propre histoire, parce que nous cédons à la force des images sans les mettre en perspective, parce que nous jugeons sur l’apparence et que nous avons renoncé, une fois pour toutes, à contrarier l’opinion publique.
Il est, paraît-il, urgent de sanctionner Israël, alors que nous avons attendu deux ans pour condamner les attentats antisémites qui, cinquante ans après la nuit de cristal, frappent en Europe les personnes comme les lieux de culte ou les écoles juives. Comme nous avions également omis de nous indigner du lynchage barbare de deux Israéliens par une foule ivre de sang et comme nous continuons à nous taire devant les exécutions sommaires des Palestiniens qualifiés honteusement de "collaborateurs". Il est vrai que nous nous étions déjà tus lorsque le dictateur syrien proféra des propos ouvertement antisémites sur notre sol et que nous avions aussi laissé notre honneur à Durban où, dans les mots, s’annonçait le 11 septembre…
Depuis que Yasser Arafat a déclenché la seconde Intifada, les civils israéliens vivent chaque jour dans la peur du massacre, et nous nous contentons de condamner verbalement les attentats sans jamais agir de tout notre poids politique et économique pour que soient arrêtés et punis leurs auteurs, leurs complices et leurs instigateurs. Tout au contraire, si l'on se réfère au projet de résolution, nous devrions sanctionner ceux qui les poursuivent ! Il faudra quand même expliquer pourquoi ces crimes suscitent chez nous moins d’indignation militante, de résolution, que les représailles ciblées et leurs conséquences, certes parfois tragiques pour des civils ; Il faudra expliquer pourquoi, alors qu’Israël a été contraint, par la passivité de l’Autorité palestinienne, à rechercher les auteurs de ces actes, parfois au sein même de sa direction, il s'est trouvé des Européens pour leur offrir de servir de boucliers humains.

A Nanterre, la semaine dernière, les Français ont touché du doigt avec horreur ce que pouvait être la folie meurtrière ; ils peuvent imaginer ce que ressentent les Israéliens en butte aux attentats en moyenne toutes les deux heures. Je demande au nom de quoi Israël devrait-il être le seul Etat qui devrait laisser assassiner les siens ? A-t-on pensé, avant de rédiger notre déclaration, aux enfants qui ont perdu leurs parents dans les attentats, aux parents qui ont perdu un enfant, à ces familles brisées qui avaient cru échapper à la persécution et aux malheurs rencontrés souvent chez nous, en Europe ? De toute évidence, leur sort inspire moins de compassion que celui des hommes en armes "assiégés" dans les lieux saints qu'ils ont pris en otage. On pourrait le déplorer mais là n'est pas l'essentiel. Au nom de quelle éthique faudrait-il négocier avec les terroristes ? En France, a-t-on négocié avec les terroristes du GIA ou avec le preneur d'otages d'une école de Neuilly ?
Nous devons, si nous prétendons jouer un rôle dans l’avenir du monde et tout simplement si nous entendons être dignes de notre héritage spirituel, entendre les leçons que nous inspire avec force notre histoire, affirmer que rien, aucune cause, aucune raison ne peut justifier qu’il soit délibérément porté atteinte à des civils. Et vis-à–vis du terrorisme, notre attitude concrète n’a pas toujours été aussi claire que nous voulons bien le croire.

Ainsi, il y a de la complaisance à justifier le terrorisme par le désespoir. Cette explication est facile mais elle est fausse et, pour tout dire, infâme. Elle est fausse parce que nos esprits rationnels et cartésiens ont du mal à concevoir que le fanatisme ne naît pas du désespoir mais au contraire de la folle espérance d’un au-delà "peuplé de vierges". Elle est infâme parce qu’expliquer le terrorisme c'est déjà le justifier. Justifierait-on l'acte fou de Nanterre par le désespoir ? « L'histoire humaine est une vallée de larmes »¹ et pourtant, jamais, nulle part l'on n’avait vu de tels actes. Il n’y a rien de grand, rien de noble dans cette forme de terrorisme que l’on appelle injustement martyre, c’est la façon la plus lâche et la plus monstrueuse de défendre une cause.

Dans nos précédentes résolutions, nous avions pris l'habitude, au mieux, de renvoyer les parties dos à dos, comme si les torts étaient nécessairement partagés. Ce qui nous donne bonne conscience, l'illusion d'être juste. Bien sûr, on peut critiquer Israël, la politique de son gouvernement, mais comment mettre sur le même plan système dictatorial et démocratie ? Ceux qui commettent ces attentats et ceux qui cherchent, même brutalement, à y mettre fin ? Comment ne pas faire la différence entre ceux qui visent délibérément des civils parce que c'est le mode d'action politique qu’ils jugent le plus efficace et ceux qui subissent leurs actes ? Renvoyer les parties dos à dos, refuser de juger, c’est déjà faire preuve d'aveuglement moral. Mais, en réalité, cette résolution n'est même pas équilibrée puisqu'elle ne condamne aucunement Arafat pour ses choix désastreux et ses appels incessants au Djihad, réservés à la langue arabe.

Et puis il n'est pas interdit d'être décent. Il nous faut beaucoup d'orgueil pour sanctionner Israël, son peuple, son armée de civils, sa vitalité démocratique. Et si la responsabilité collective a un sens, je ne suis pas sûr que notre histoire lointaine ou notre passé récent nous qualifient vraiment pour porter de tels jugements. Il suffit de voir comment, lorsque nous avons réagi, nous étions nous-mêmes confrontés à des difficultés analogues. Est-ce l'Italie des carabiniers de Gênes ou bien la Suède des gendarmes de Göteborg qui donnent à Israël des leçons de mesure dans le maintien de l'ordre public ? Est-ce la France dont le contingent campa aux portes de Srebrenica durant les massacres ? Est-ce l'Espagne qui réprima comme l'on sait les terroristes basques ? Est-ce l'Angleterre qui censura la guerre des Malouines qui donne à l’état hébreu des leçons de transparence ?
Plutôt que se précipiter pour accabler à nouveau Israël, nous ferions mieux de nous interroger sur les conséquences désastreuses des positions invariablement critiques que nous avons adoptées depuis des années et dont le seul effet a été de renforcer l’isolement des pacifistes israéliens et de radicaliser leurs positions ; « vous avez détruit le camp de la paix » écrivit récemment un ancien militant de Shalom Archav.
Ensuite, nous avons incité les dirigeants palestiniens à l’intransigeance, et forts du soutien inconditionnel de l’Europe, ils ont cru devoir refuser les offres de paix et surenchérir par la violence.

Mes chers collègues,

Cette résolution n'est ni juste, ni utile. L'Europe pourrait pourtant apporter une contribution décisive, elle a les moyens d'être crédible. Il faudrait pour cela qu’elle reste dans son rôle en aidant à un vrai développement des territoires palestiniens - et demain de l'Etat palestinien - en posant comme condition absolue de son concours le respect des droits fondamentaux.

François ZIMERAY
[Texte aimablement communiqué par Betty Dan, Directrice de la revue "Contact J", Bruxelles.]

Le Monde du 17/04/2002 

 

Palestine = Tchétchénie ?, par Armand Boukris 

Une fois de plus, Le Monde du 12 avril consacrait sa "une" ("La solitude d'Israël face à la pression internationale") au conflit israélo-palestinien. Dans le même journal, un petit article, qui sera passé presque inaperçu, relatait la position du Parlement européen face au drame tchétchène (titre : "La Tchétchénie ne mobilise pas les eurodéputés", sous-titre : "Une résolution s'abstient de condamner fermement la Russie"). 

 

On peut s'étonner du traitement de l'information par les médias en général sur ces deux conflits alors que, pour reprendre la formule d'un député européen, "Il y a plus de morts en Tchétchénie qu'au Proche-Orient". 

 

On peut s'étonner aussi qu'aucune manifestation importante ne soit organisée pour protester contre la politique de Poutine et qu'aucune Eglise orthodoxe en France n'ait été la cible d'attentat. Pourtant, les Tchétchènes sont en majorité musulmans et devraient bénéficier de la solidarité de leurs coreligionnaires en France et dans le monde. 

Que les Etats-Unis combattent le terrorisme hors de leur territoire paraît légitime aux yeux de l'opinion politique internationale ; que la Russie combatte en Tchétchénie contre ce qu'elle appelle les terroristes, peu de personnes s'en offusquent. 

Mais qu'Israël, petit pays, essaye de lutter contre des actes de terrorisme à quelques kilomètres de ses frontières et voilà que les Etats protestent. 

Et les actes d'antisémitisme ne sont pas la conséquence du conflit israélo-palestinien mais de la condamnation par les gouvernements de la politique de Sharon. Aucune circonstance atténuante n'a été trouvée à sa politique par les gouvernements. Seule la communauté juive essaye de comprendre la position d'Israël dans son combat contre le terrorisme qui frappe chaque jour des civils israéliens, juifs pour la plupart. 

 

Les médias qui ont pris position contre la politique de Sharon n'ont pas joué leur rôle et n'ont pas expliqué que le cycle infernal des attentats suivis de représailles a commencé par des attentats contre les civils et que la présence de colons, peu nombreux dans les territoires occupés, n'est pas la cause des actes perpétrés par les kamikazes. Le plan saoudien de reconnaissance de l'Etat d'Israël en contrepartie de la "libération" des territoires conquis en 1967 a été présenté comme une panacée, alors qu'il ne règle rien et ne préjuge pas le droit au retour des Palestiniens dans leurs foyers d'avant 1948. 

 

Et quelle serait la durée d'un engagement pris par des Etats dans lesquels la démocratie est absente et pour lesquels la lutte contre Israël justifie tous les maux vécus par leurs populations ? 

La revendication par les Palestiniens d'un Etat indépendant est légitime. Il en est de même probablement pour les Tchétchènes. Mais avant de prendre position, j'aimerais que les médias m'expliquent quels sont les enjeux, les revendications des uns et des autres, les intérêts de l'Occident. Peut-être que, bien informé, je pourrais crier haut et fort : Palestine, Tchétchénie, même combat. 

 

Armand Boukris est avocat, professeur associé à l'université Paris IV-Sorbonne.

 

 

RETOUR A LA PAGE D'ACCUEIL